Elles sont transgénérationnelles et s’inscrivent aussi au moment de notre conception et de notre naissance. Ainsi, le cours des événements imprime en nous son histoire.
Mais le temps n’est pas le seul à agir, l’espace est également très influent, l’environnement dans lequel nous avons grandi et dans lequel nous continuons à évoluer. Quelle que soit notre adaptation, il nous détermine. En nous adaptant, nous sommes capables de développer à la fois des résiliences et des résistances.
Empreintes et adaptations ainsi nous moulent, nous façonnent, nous forment et nous donnent une apparence, une silhouette, une posture, une dynamique de mouvement, engramment une certaine relation à l’espace.
Nous sommes donc avant tout des formes. Qui changent, se modifient et mutent selon le contexte dans lequel elles évoluent. Des formes qui se déclinent comme autant de structures caractérielles : l’une est agacée, l’autre est enthousiaste, celle-ci est toujours tournée vers son passé, celle-là cherche toujours à anticiper, etc. C’est pourquoi nous parlons de « formes caractérielles », mais aussi, comme au théâtre, de caractères et de personnages. Il n’y a donc pas un seul instant où nous ne sommes pas animés par une forme.
À chaque forme / personnage correspond une posture, des « plis », une manière de se déplacer, une émotion, un sentiment, une voix, des pensées, des comportements quotidiens, amoureux, professionnels, des goûts vestimentaires, des activités, etc. La forme raconte une histoire, nous évoque un décor, un costume, une situation qui peut être grotesque, mélodramatique ou tragique, parfois totalement surréaliste, mythologique ou poétique. C’est aussi une dynamique de vie que nous pouvons transposer dans sa dimension transgénérationnelle, archétypale et totémique : animale, végétale ou minérale.
Chaque forme possède aussi son propre cycle. Elle naît, vit et meurt d’une certaine manière. Elle s’éveille dans un certain contexte. Elle jouit (ou ne jouit pas) selon un certain rythme. Elle peut développer aussi sa propre maladie : Alzheimer pour celle qui oublie, problèmes cardiaques pour celle qui a le cœur fermé, etc. Nous pourrions ainsi imaginer que la forme de notre construction caractérielle dont l’événement originel est le plus fort prenne l’ascendant sur les autres.
Nos formes interagissent avec l’environnement et déclenchent des réactions autour d’elles : la joie, l’excitation, la peur, le dégoût, l’apaisement, etc. En changeant de « forme », nous changeons « d’état », et nous changeons le contenu : nos émotions, nos pensées, nos attitudes. Notre relation au monde et à nous-mêmes se transforme.
Faire émerger nos « formes » se situe donc au cœur du cheminement en ATA. Mais comment y parvenir ? Pour qu’elles se dévoilent, il nous faudra apprendre à voir. Car nos formes (et c’est une chance !) sont toutes identifiables et lisibles. Wilhelm Reich, dans son ouvrage « L’Analyse caractérielle », avait d’ailleurs noté que le caractère était imprimé dans une dynamique corporelle. Dès que notre regard est initié, nos formes apparaissent ainsi, à travers une posture corporelle, une dynamique de mouvement ou une relation à l’espace particulières à chacune : cette poitrine qui regarde le ciel et nous donne une fière allure ; ces épaules enroulées vers l’avant qui semblent porter un fardeau ; ce plexus solaire affaissé qui semble avoir reçu un coup et contenir sa colère ; ce ventre proéminent porté vers l’avant qui inspire la bonhomie ; ce manque de torsion de la colonne vertébrale dans la marche qui révèle une contrariété profonde, etc.
Il nous faudra également mettre en place notre Feu d’observance, un état de disponibilité et de clairvoyance. Nous apprendrons à utiliser plusieurs outils comme l’analyse du mouvement ou les Axes des dynamiques vitales. Nous apprendrons à traquer nos formes et à nous traquer pour ne pas les laisser s’échapper. Nous appliquerons la « théorie des vampires » : nous éclairerons nos formes caractérielles grâce aux rayons ardents de notre conscience pour qu’elles cessent de nous posséder. Nous apprendrons aussi à les apprivoiser. En nous amusant avec elles. En les nommant. En prenant plaisir à les découvrir… Et à les jouer. En les célébrant. En les amplifiant. Nous apprendrons à les « défroisser ». À défaire les « plis » de l’être pour que peu à peu se révèle notre essence, au-delà de notre histoire.